Le pire est une chanson en Français
Le pire, c'est de naître femme dans un monde où l'homme
Mouillé de chaud, demeure sexiste et macho
Englué dans trente kilos de muscle artificiel
Dénonçant les défauts des entrailles de maman parce que c'est une femelle
Et puis se faire brûler la peau par les rétines affûtées
De ces meutes de loups affamés
Bavant sur les cadenas à huit chiffres des soutiens gorges harnachés
Aux décolletés plongeants des passantes élégantes mais fatiguées
Non, le pire, c'est de naître étranger
Dans un pays qui t'a vu grandir, dans un pays qui t'a vu ramer
Qui se dit être ta maison, mais qui te cloue au bas de l'échelle en déclarant
Dommage, vous auriez pu tout avoir, un job intéressant, une famille, des enfants
Vous auriez certainement pu vous épanouir, jouer dans la cours des grands
Malheureusement, les couleurs de votre passeport disent que vous faites Ramadan
Et chez nous, on a de la place pour tout le monde hein, vraiment
À condition qu'ils affichent sur leur visage la couleur du parmesan
C'est horrible ça, c'est avoir une longueur de retard toute sa vie, pour une couleur de peau
Être déclassé par les regards humiliants de ces hommes politiques en une des journaux
Et de se sentir trop nu à cause d'un drapeau
Se sentir trop différent à cause d'un accent
Le pire, c'est de naître aveugle avec les yeux ouverts
Déposé au pied d'un arc-en-ciel, celui qui rend la terre si belle
Condamné à dessiner le bonheur avec une peinture imaginaire
Sans rouge, sans jaune, sans bleu, sans vert
Ou alors, ce qui doit être pire encore, c'est de naître riche là où il n'y a rien à acheter
Où l'amour est en libre-service sur chaque arbre fruitier
Avoir un portefeuille ruisselant de billets verts
Dans un monde où la gratuité a englouti le quartier des affaires
Être blindé de thune au point de devoir réfléchir à comment dépenser ce qui ne coûte rien
Au point de ne plus te souvenir dans quelle foutue baraque tu as oublié tes gamins
Au point de te payer du travail à défaut de te payer des vacances
Au point d'avoir loué les trois quarts du Paradis pour toi et toute ta descendance
Non, finalement, le pire du pire, ça doit être de naître gay
De se faire montrer du doigt, de défrayer la chronique
Parce que deux mecs en slip, ça fait toujours sourire, non? C'est typique
Et de s'entendre dire par les plus maladroits
"Aimer quelqu'un du même sexe, c'est n'aimer que soi
C'est égoïste, c'est malsain, ça devrait être interdit par la loi
On devra leur expliquer nous, à nos enfants, à quoi ça ressemble la normalité
Leur faire gober que faire crac-crac avec son équivalent
C'est juste une vilaine mode qui va finir par passer"
Bah voilà, c'est ça le pire: de naître entouré par des gens qui te filent mal au bide
Qui te lacèrent l'existence de remarques putrides
Être intoxiqué par des mollusques olympiques, fermés comme des huîtres hermétiques
Productrices de fausses perles en faux plastique
Le pire, c'est d'être voué à subir la frustration de cet humain pessimiste
Celui qui dit évoluer sur le droit chemin, mais qui en réalité, ne sait faire que du hors-piste
Se retrouver parachuté dans un remake bon marché de la Préhistoire
À cette époque où la peine était de mort et où les règles du jeu étaient soit blanches, soit noires
Le pire, c'est de se faire condamner par les jugements de ceux qui pensent avoir raison
Subir les recommandations de ces inflexibles bourrés de principes à la con
Ceux qui te demandent ta confiance pour te la chérir, te l'embrasser, puis te l'acheter
Et qui finissent par te la broyer d'un revers de reproche
Pour l'épingler à leur tableau de chasse avec audace, à grand coup de pioche
Tout compte fait, le pire aujourd'hui, c'est de regarder ce que font les autres pour essayer d'exister
C'est croire que parce que tu es différent, tu as moins de chance d'y arriver
Et penser un truc comme ça, qui que l'on soit, c'est se tirer une balle dans le pied
C'est comme espérer gagner une course d'orientation, mais avec les yeux bandés
Alors assume d'être autrement
Rigole quand les gens pleurent, chante quand les gens se taisent
Embrasse quand les gens se frappent et dors quand les gens baisent
Défends quand les gens attaquent, adore quand les gens détestent
Reviens quand les gens partent et pars quand les gens restent
Marche quand les gens courent, regarde quand les gens occultent
Chuchote quand les gens crient et souris quand les gens t'insultent
N'attends pas que demain redevienne hier, ni que l'automne devienne l'hiver
Apprends à lire l'heure à l'instant présent, mais surtout laisse le temps au temps
Même au pied du sapin, ce n'est pas l'emballage qui fait le cadeau
Et pour petit rappel, n'oublie jamais qu'un renard peut très bien plumer un corbeau